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J’ai sillonné les rues de petites et grandes communes, interrogé passants et commerçants, récolté des données et confronté les annonces officielles. Ce que j’ai découvert confirme une bascule étonnante pour notre rapport à l’argent liquide. À la surprise générale, plusieurs villes françaises verront, dès l’été prochain, leurs distributeurs automatiques classiques disparaître complètement. Une note officielle adressée aux mairies précise même : « À compter du 30 juin 2025, il ne sera plus possible de retirer des billets dans les anciens automates dans les zones urbanisées prioritaires visées par le plan de mutualisation. »
Un basculement programmé dès 2025
L’annonce est tombée discrètement, bien loin des projecteurs médiatiques : d’ici la fin juin 2025, une première vague de disparition de DAB concernera des zones urbaines ciblées, notamment certaines parties de Bordeaux, Nancy, Roubaix, Saint-Étienne, ainsi que plusieurs quartiers périphériques de Marseille et Lyon. Ces emplacements ne verront pas leurs automates remplacés immédiatement. En clair, entre le 30 juin et la fin de l’année, il ne sera plus possible dans certaines rues de ces villes de retirer des espèces comme avant.
C’est le chantier du déploiement de « Cash Services » qui en est responsable. Cette structure commune mise en place par la BNP Paribas, Société Générale et Crédit Mutuel vise à installer un nouveau type d’automate, plus polyvalent. Le calendrier est précis, et les chiffres le confirment :
État de déploiement | Nombre de sites | Objectif |
---|---|---|
Fin 2023 | 1 000 | Début de la transformation |
Juin 2025 | 1 000 | Automates opérationnels |
Décembre 2025 | 3 000 | Fin de la première vague |
Fin 2026 | 7 000 | Couverture nationale ciblée |

Des quartiers qui, un temps, resteront sans alternative
Entre deux phases logistiques, il existera donc des « trous » dans la carte du retrait liquide. J’ai rencontré Sarah Redon, employée dans un bureau de tabac d’un quartier populaire de Nancy, qui m’a confié sa crainte :
« On a reçu un courrier nous disant que le distributeur devant notre commerce sera démonté cet été. On nous dit que d’autres machines vont revenir plus tard, mais aucune date n’est précisée. Les clients sont inquiets, certains se demandent où ils vont retirer leurs pensions. »
Ce flou temporaire touche surtout les quartiers où les banques ferment déjà leurs agences depuis plusieurs années. La promesse de machines multifonctions ne compense pas, pour certains, l’absence concrète de dispositif pendant plusieurs mois.
Les nouveaux automates : promesse ou gadget ?
Les automates Cash Services sont plus complets, affirme le groupement bancaire responsable du projet. Ils permettent :
- Le retrait d’espèces sans distinction de banque
- Le dépôt de billets et de chèques
- Un affichage personnalisé à l’enseigne de la banque d’origine
Mais ces arguments peinent à convaincre partout. À Roubaix, un collectif citoyen conteste fermement la disparition temporaire des automates dans trois arrêts stratégiques du centre-ville. Selon leurs propres relevés, près de 2 000 personnes utilisent ces points chaque semaine. Et aucune installation alternative n’est annoncée avant octobre 2025.
Un retrait bientôt possible chez les commerçants ?
Une réforme bancaire prévue pour entrer en application dès 2026 prévoit l’élargissement du retrait chez les commerçants à toutes les cartes bancaires, peu importe la banque d’origine. Une évolution dans la logique de service de proximité. Mais cette mesure n’est pas encore opérationnelle. Encore une fois, le fossé temporel entre la suppression des anciens DAB et l’arrivée de solutions alternatives crée une incertitude réelle pour de nombreux usagers.

Une manœuvre nationale masquée par la modernisation
Certaines communes rurales sont les premières à avoir perdu tous leurs distributeurs, souvent sans alternatives immédiates. Le phénomène s’installe lentement dans les zones urbaines, par fraction géographique. On parle là d’un retrait progressif mais intentionnel. Pour donner un ordre d’idée, selon les dernières données, la France comptait encore près de 27 000 DAB à la mi-2023. Ce chiffre sera réduit à moins de 20 000 d’ici la fin 2025 — mais on ne parle pas encore de désert monétaire partout.
Ce qu’il faut anticiper
Il est donc utile de vérifier si votre quartier figure parmi ceux où la transition a lieu sans présence directe de nouveaux automates. Les banques n’ont pas toujours communiqué localement. Certaines mairies, face à la pression, ont publié des listes locales. D’autres tentent encore d’obtenir des précisions sur les délais de remplacement.
Pour mémoire, voici les principales villes ou zones départementales concernées par la perte temporaire ou définitive de DAB entre juin et décembre 2025 :
- Quartiers Nord de Marseille
- Rive droite de Bordeaux (Bastide, Cenon)
- Centre-ville de Roubaix
- Secteurs sud de Nancy
- Partie ouest de Saint-Étienne
- Certaines communes de l’Essonne en périphérie parisienne
Des visites de terrain et des demandes menées avec plusieurs associations révèlent un décalage entre l’ambition technologique des banques et les besoins concrets des habitants.

Vers une reconfiguration du rapport au liquide
Ce qui se joue ici dépasse le simple remplacement de machines : c’est une transformation de l’accès à la monnaie fiduciaire, et en creux, une remise en question de son rôle dans nos usages quotidiens. L’occasion pour certains d’accélérer la transition vers un monde plus numérique. Une inquiétude grandissante, en revanche, pour celles et ceux qui ont encore besoin de billets pour exister économiquement.