Dans cet article Dans cet article
- Un principe posé pour les salariés itinérants
- Les conditions strictes pour être rémunéré
- Les métiers concernés par cette requalification
- Ce qui n’est pas concerné
- Comment appliquer la compensation ?
- Un alignement juridique avec l’Europe
- Conséquences pratiques pour les employeurs
- Un changement durable dans la jurisprudence sociale
Une décision récente de la Cour de cassation rebat les cartes sur la prise en compte du temps de trajet dans la durée de travail des salariés itinérants. Elle représente une évolution significative pour les missions impliquant des déplacements dès le début et jusqu’à la fin de la journée.
Un principe posé pour les salariés itinérants
La Cour de cassation, dans son arrêt rendu sous la référence n° 20-21.924, a reconnu que les temps de trajet réalisés entre le domicile du salarié et les clients ou sites professionnels peuvent être qualifiés de temps de travail effectif. Ce changement concerne notamment les travailleurs itinérants, c’est-à-dire ceux dont la profession impose des déplacements fréquents en l’absence d’un lieu de travail stable.
Cette décision s’aligne sur une jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), datant de 2015, qui avait déjà reconnu ce type de déplacements comme du travail effectif dans certaines conditions.

Les conditions strictes pour être rémunéré
Le caractère rémunérable du temps de trajet ne s’applique pas à tous les salariés. Pour que cette durée soit considérée comme du travail effectif, trois critères cumulatifs doivent être remplis :
- le salarié est à la disposition de l’employeur ;
- il exécute ses directives sans pouvoir s’y soustraire ;
- il ne peut se consacrer à des activités personnelles durant le trajet.
Dans ce contexte, la rémunération concerne exclusivement les trajets effectués entre le domicile du salarié et les lieux de rendez-vous professionnels lorsqu’ils précèdent ou succèdent directement à une mission.
Les métiers concernés par cette requalification
Plusieurs profils professionnels sont touchés par cette décision, notamment :
- les techniciens de maintenance ou d’intervention ;
- les commerciaux itinérants multi-sites ;
- les dépanneurs informatiques ou en télécoms ;
- les chauffeurs-livreurs selon leur organisation de travail.
Ces salariés partagent une caractéristique : le point de départ et de retour de leur journée de travail est leur domicile, et non un site professionnel fixe défini contractuellement.
Ce qui n’est pas concerné
À l’inverse, un salarié ralliant quotidiennement un bureau permanent ne peut bénéficier de cette reconnaissance. Le trajet domicile-travail classique, sans instructions spécifiques, reste considéré comme du temps personnel. Dans ce cas, seule la prise en charge de 50 % des frais de transport en commun par l’employeur est obligatoire, conformément à l’article du code du travail en vigueur (Service-public.fr).

Comment appliquer la compensation ?
L’État prévoit que les trajets professionnels plus longs que la normale doivent être compensés, à défaut d’être rémunérés. Cela peut prendre la forme soit :
Situation | Modalité de compensation |
---|---|
Trajet avec directives pendant le déplacement | Temps qualifié de travail effectif et donc rémunéré |
Temps de déplacement supérieur au trajet habituel | Repos ou compensation pécuniaire prévu par accord ou usage |
Trajet sans contrainte ni communication professionnelle | Aucune contrepartie due (hors remboursement transport classique) |
En pratique, les entreprises doivent donc adapter leurs conventions collectives, chartes internes ou accords d’entreprise pour intégrer ces modalités et éviter les litiges.
Un alignement juridique avec l’Europe
Ce revirement apporte une cohérence entre le droit français et les exigences du droit européen. La CJUE avait déjà tranché en 2015, dans le cadre d’un contentieux impliquant une entreprise espagnole de sécurité, que ces déplacements représentaient « un outil nécessaire » au bon accomplissement de missions professionnelles (Berton Associés).
Le travail effectif ne commence donc pas nécessairement à l’arrivée sur site, mais dès le moment où le salarié, sans pouvoir échapper aux instructions, commence son déplacement professionnel.

Conséquences pratiques pour les employeurs
Les entreprises concernées doivent à présent réviser leur politique de calcul du temps de travail. Cette révision passe par :
- la relecture des contrats de travail et fiches de poste ;
- l’encadrement des déplacements par des directives précises ;
- l’intégration d’outils de suivi horaire pour documenter les trajets rémunérés.
Des outils numériques permettent déjà d’optimiser cette gestion, notamment pour les commerciaux et techniciens. Une page informative du cabinet Ellipse Avocats (source ici) conseille d’intégrer une clause précisant que les premiers et derniers trajets, sous directive, sont reconnus comme temps rémunéré.
Un changement durable dans la jurisprudence sociale
Depuis cette décision, plusieurs juridictions prud’homales ont commencé à recalculer les temps compensables sur la base de cette jurisprudence. Ce mouvement de fond pourrait impacter la manière dont de nombreuses entreprises pilotent leurs équipes itinérantes, qu’il s’agisse du transport, de la maintenance ou de la vente.
Des dispositifs comme la déclaration des temps de déplacement dans les feuilles de temps ou l’utilisation d’applications de géolocalisation professionnelles permettent d’objectiver les démarches. Attention cependant aux limites en matière de respect de la vie privée des salariés.
Cadre LégalLe code de la route a tranché : ce n’est ni 70, ni 80 ans l’âge maximum pour conduire sans être un dangers pour les autresLe principe est désormais établi : lorsque le salarié n’a pas de bureau fixe et agit dès son domicile pour le compte de l’entreprise, en suivant des directives précises, son trajet initial comme son déplacement de fin de journée peuvent et doivent être rémunérés.
C’est une victoire importante pour tous ceux qui bossent sur la route.
Mouais… encore une mesure qui sera contournée par des clauses obscures.
Merci la Cour de Cassation, on avance enfin ! 🙏
A voir si dans les faits les employeurs vont vraiment appliquer cette règle.
Je croyais que c’était déjà le cas depuis longtemps… 🤔
Donc si je pars de chez moi à 6h du mat direction un client, c’est payé ? 😎
Trop compliqué à mettre en place, non ?
Bonne décision, mais j’imagine déjà certains patrons chercher la faille.
Ça risque de coûter cher aux entreprises… mais c’est juste !
Et pour les livreurs Uber, ça marche aussi ou pas ?
C’est quand même dingue qu’il ait fallu attendre 2024 pour ça 😅
Merci pour cet article clair, j’y vois beaucoup plus net maintenant.
Encore une contrainte pour les employeurs… ça va finir en licenciements.
Et comment on prouve qu’on était bien sous directive de l’employeur pendant le trajet ?
Super décision, je me sens enfin reconnu dans mon travail quotidien 👍
Est-ce que cela s’applique aussi aux intérimaires ?
Enfin une bonne nouvelle pour les salariés itinérants !