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Le code de la route a tranché : ce n’est ni 70, ni 80 ans l’âge maximum pour conduire sans être un dangers pour les autres

Des couloirs des préfectures aux cabinets médicaux, une question s’impose de plus en plus souvent : jusqu'à quel âge peut-on conduire sans mettre les autres en danger ? Les statistiques, les témoignages et les faits tracent une frontière bien plus floue qu’on pourrait le croire.

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J’ai voulu comprendre où se situe réellement la limite. Tandis que le débat enfle au gré des faits divers et des discussions de comptoir, certains affirment haut et fort : « Ce n’est ni 70, ni 80 ans l’âge maximum pour conduire sans être un danger pour les autres. » Une assertion que j’ai retrouvée telle quelle dans la bouche d’André, 84 ans, encore au volant de sa petite Peugeot grise, deux fois par semaine.

Un permis à vie, sauf exception

En France, contrairement à une idée reçue persistante, il n’existe pas de limite d’âge fixée dans le code de la route. Le permis de conduire, une fois obtenu, reste valable à vie. Pas de retrait automatique à 70, 75 ou 80 ans. Cette absence de seuil légal tranche nettement avec les politiques plus restrictives de certains pays européens.

Comme me l’a confirmé un agent de la préfecture de la Haute-Vienne, « la seule chose qui peut annuler ou restreindre le droit de conduire, c’est une décision médicale ou judiciaire, pas un anniversaire ». André, que j’ai rencontré au marché d’Orléans, abonde dans ce sens :

« Je reste prudent. Je choisis mes horaires, j’évite les heures de pointe et je ne conduis plus la nuit. Mais je n’ai jamais causé d’accident. Ce serait injuste qu’on me retire mon permis juste parce que j’ai 84 ans. »

Les chiffres dessinent une réalité contrastée

Les données disponibles montrent que les seniors au volant ne représentent pas nécessairement un risque accru généralisé. Selon une étude de l’Inserm, l’âge moyen du dernier trajet en voiture comme conducteur est estimé à 79 ans pour les femmes, et 82 ans pour les hommes. Bien loin des clichés sur les réflexes défaillants à partir de 70 ans.

En revanche, après 75 ans, certaines statistiques nuance cette idée de conduite « sans danger » :

Tranche d’âge Accidents corporels par 100 000 conducteurs Responsabilité présumée
65-74 ans 160 61%
75-84 ans 210 65%
85 ans et plus 270 72%

Autrement dit, les accidents sont plus nombreux avec l’âge, et les personnes âgées en sont plus souvent à l’origine lorsque leur responsabilité est examinée. Mais ces chiffres doivent être pondérés : ces conducteurs roulent généralement moins, et sur des trajets courts. Corrélé au kilomètre parcouru, le taux reste modéré par rapport aux jeunes conducteurs de moins de 25 ans.

Des facultés qui évoluent, mais qui se compensent

Le vieillissement affecte indéniablement plusieurs capacités utiles à la conduite :

  • La vue baisse, notamment la vision nocturne
  • Les réflexes sont plus lents
  • Les troubles cognitifs deviennent plus fréquents après 80 ans

Mais les seniors compensent souvent ces fragilités. Une conduite plus souple, une meilleure anticipation, l’évitement des situations complexes. Cette prudence acquise à force d’expérience évite bien des collisions. Mireille, 78 ans, retraitée en Saône-et-Loire, me l’a résumé ainsi :

« Je sais que je ne suis plus la même conductrice qu’à 40 ans. Mais je fais attention. Je ne prends plus l’autoroute depuis longtemps. Ce serait absurde de traiter tous les vieux comme des dangers sur pattes. »

Et chez nos voisins ?

À l’échelle européenne, la France fait figure d’exception. L’Italie impose une visite médicale tous les deux ans après 80 ans. L’Allemagne, elle, encourage les contrôles volontaires pour les plus de 75 ans, mais sans obligation. Les Pays-Bas ont fixé un passage médical tous les cinq ans pour les conducteurs âgés de 75 ans ou plus. Le cas le plus extrême reste celui d’un petit pays nordique qui interdit le renouvellement du permis au-delà de 68 ans.

J’ai consulté la proposition de la Commission européenne visant à mettre en place un permis senior soumis à évaluation médicale tous les cinq ans dès 70 ans. Une orientation que la France n’a pas retenue à ce jour.

Un contrôle au cas par cas, et des débats en perspective

Chez nous, seule une visite médicale est imposée dans deux situations :

  • Après une suspension ou annulation du permis
  • En cas de demande d’un proche ou des forces de l’ordre pour doute sur l’aptitude

Cela signifie que théoriquement, un conducteur de 92 ans sans antécédent, en bonne forme, peut continuer à conduire sans aucun contrôle, ni examen médical.

Ce modèle français, fondé sur la responsabilité individuelle, soulève aujourd’hui des débats éthiques et politiques. À qui revient la responsabilité de dire à un proche qu’il doit rendre les clés ? À quel moment doit-on instaurer une évaluation neutre ?

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Le sujet divise entre ceux qui dénoncent un laxisme potentiellement dangereux et ceux qui redoutent une stigmatisation de l’âge. La tension monte d’un cran chaque fois qu’un accident grave implique une personne très âgée.

Alors non, ce n’est ni à 70, ni à 80 ans que la loi tranche. Elle s’en remet à la médecine, aux proches, ou à la présence d’esprit des conducteurs eux-mêmes. Ce flou suscite de vives réactions, et il y a fort à parier que les choses évolueront. Lentement, certes, mais sûrement.

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