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Une pièce chinoise retrouvée à Bordeaux vendue 400 000 €, soit dix fois plus que sa mise à prix

Trouvée dans un grenier bordelais, une petite pièce en argent a déchaîné les passions des plus hauts collectionneurs. Et pour cause : son histoire, longtemps oubliée, la liait à l’un des épisodes les plus intenses du XXe siècle en Asie.

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Elle reposait depuis des décennies, sans bruit, dans une cartouche de cigarettes Marlboro au fond d’un grenier bordelais. Le 19 septembre, elle a été adjugée pour 400 000 euros à Paris. Il s’agit d’un dollar chinois en argent de 1897, frappé dans la province de Kiangnan. Une pièce à la fois rarissime et convoitée, qui éclaire le parcours sinueux d’une collection exceptionnelle et la mémoire longue de la numismatique mondiale.

Un trésor oublié refait surface

La pièce fait partie de ce que les experts appellent désormais la « collection Affra », du nom de João Rodrigues Simões Affra, ancien ambassadeur portugais en poste à Shanghai entre 1945 et 1950. L’homme avait amassé, au fil de sa carrière diplomatique en Chine, un ensemble impressionnant de monnaies exotiques, en particulier asiatiques. Après sa mort, le trésor s’est lentement effacé des inventaires familiaux, jusqu’à sa redécouverte fortuite dans un grenier de Bordeaux, caché dans de banales cartouches de cigarettes.

Une pièce au pedigree impeccable

Selon l’expert numismate Fabien Robaldo, chargé de l’expertise pour la vente : « Cette pièce en particulier, un dollar Kiangnan de 1897, présente tous les signes d’un exemplaire de haute qualité. Elle est d’une fraîcheur remarquable, avec une frappe nette et une patine naturelle. » Elle avait été estimée entre 40 000 et 60 000 euros par la maison de ventes Millon Riviera. Le résultat final, 400 000 euros, constitue une envolée spectaculaire et une multiplication par dix de sa mise à prix.

« J’ai reconnu immédiatement la pièce comme une variété extrêmement rare, mais je ne m’attendais pas à une telle lutte acharnée entre les enchérisseurs, confie Fabien Robaldo. Ce type d’enchère montre qu’on atteint des sommets dès qu’il y a une provenance historique solide. »

La vente : un théâtre de rivalités internationales

La vacation du 19 septembre s’est tenue à l’Hôtel Drouot, haut lieu du marché de l’art à Paris. Dès l’ouverture des enchères pour cette pièce, les lignes téléphoniques se sont animées. Chinois, Américains, Européens : plusieurs grands collectionneurs ont manifesté leur intérêt, intensifiant la pression. En quelques minutes, les 100 000 € ont été franchis. La bataille s’est poursuivie au-delà des 300 000 € avant de s’arrêter à 400 000 €, un record pour ce type de monnaie.

Cette pièce dépasse ainsi largement le précédent pic pour un exemplaire comparable, vendu 155 000 € quelques années auparavant. L’achat est resté anonyme, mais selon plusieurs sources proches du dossier, il aurait été réalisé par un collectionneur privé chinois.

Un signal fort pour les pièces asiatiques

Le marché des monnaies asiatiques connaît depuis plusieurs années une vive croissance. Ce type de pièce, en particulier les dollars frappés au tournant du XIXe et du XXe siècle, présente un intérêt historique et symbolique fort en Chine et parmi la diaspora. Leur rareté sur le marché mondial, combinée à la quête de réappropriation patrimoniale, fait monter les enchères.

Pièce Date Estimation Prix réalisé Origine
Dollar Kiangnan 1897 40 000 – 60 000 € 400 000 € Shanghai / Bordeaux
Dollar Kiangnan (vente 2019) 1897 –– 155 000 € ––

Un catalogue aux pépites insoupçonnées

Cette pièce n’était qu’un des joyaux d’une collection bien plus large. D’autres exemplaires, moins médiatisés mais tout aussi captivants, ont également suscité l’intérêt des amateurs. Le même jour, une pièce d’or médiévale dite « mouton d’or » a trouvé preneur pour 13 800 € ; des monnaies russes et italiennes ont franchi les 5 000 € ; et une pièce de 8 réales d’Amérique centrale (souvent appelée « pièce de pirate ») s’est envolée au-dessus de 12 000 €.

  • Total de la vente de la collection : 483 050 €
  • Troisième session de dispersion de la collection Affra
  • Plusieurs monnaies gradées ont dépassé les 4 chiffres

Un marché porté par le goût du récit

Là où d’autres voient juste du métal, les collectionneurs lisent une histoire. Celle d’époques troubles, de migrations diplomatiques, d’échanges culturels. La pièce chinoise partie de Shanghai en pleine guerre civile, revenue en Europe via la valise d’un diplomate et retrouvée à Bordeaux, renferme bien plus que sa valeur numéraire.

« Une monnaie, c’est comme une lettre échappée d’un tiroir, conclut Fabien Robaldo. On peut lire le monde à travers elle. »

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