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Forte régression du nombre de don à l’arrondi supérieur dans les supermarchés : les caissières vont devoir sortir les arguments

Le petit geste d’arrondi en caisse, banal pour certains, est devenu un véritable thermomètre de l'engagement solidaire en grandes surfaces. Mais en surface calme, peut parfois se cacher une tension plus profonde.

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Ils étaient des millions à arrondir, sans vraiment y penser. À chaque passage en caisse, une simple proposition : « Vous souhaitez arrondir à l’euro supérieur pour soutenir une association ? » Longtemps, la réponse fut un oui, automatique, discret. Mais dans les rayons de plusieurs enseignes, les caissières constatent aujourd’hui un revirement inquiétant. La générosité à la caisse semble marquer le pas.

Un ralentissement perçu depuis le comptoir

« Je le ressens depuis le printemps », m’a confié Julie, hôtesse de caisse dans une grande enseigne d’hypermarché en Seine-et-Marne. Cela fait dix ans qu’elle scanne les produits et propose l’arrondi à chaque client. Pour elle, le changement est net.

« Avant, les gens disaient souvent oui sans même réfléchir. Aujourd’hui, ils sont plus nombreux à refuser, ou alors ils me regardent d’un air désolé et disent qu’ils ne peuvent plus… Je vous le dis : maintenant, va falloir qu’on sorte les arguments. »

Son témoignage n’est pas isolé. Plusieurs hôtes et hôtesses interrogés dans différentes enseignes font le même constat : un fléchissement perceptible de ces micro-dons, pourtant massifs à l’échelle nationale. D’après eux, la lassitude, la méfiance mais surtout la pression budgétaire jouent largement leur rôle.

Quand la réalité contredit le terrain

Pourtant, selon les chiffres officiels, l’arrondi solidaire n’a jamais été aussi populaire. Depuis son lancement en 2013 avec le dispositif développé par l’entreprise MicroDon, on compte plus de 47,7 millions d’euros reversés aux associations. Et rien qu’en 2022, ce sont 12,1 millions d’euros qui ont été collectés dans tout le pays.

Alors comment expliquer cette dissociation entre les chiffres globaux et la perception à l’échelle locale ?

Une montée en puissance… mais pas partout

Le dispositif est aujourd’hui présent dans quelque 10 000 magasins en France, avec 45 enseignes partenaires. Mais cette couverture cache une réalité contrastée. D’un territoire à l’autre, les dynamiques sont diverses. Dans certaines zones rurales ou zones périurbaines, les taux de refus seraient en hausse. Des responsables d’équipe signalent même une baisse du taux d’acceptation de près de 15% dans certains magasins entre 2023 et 2024.

Année Montant collecté (en M€) Taux d’adhésion estimé
2019 4,2 19%
2020 6,8 28%
2021 9,4 36%
2022 12,1 44%
2023 ND Est. stable

Le taux d’adhésion national semble donc avoir atteint un plateau, avec une stabilisation plutôt qu’une régression brutale. Mais cette stagnation peut donner l’impression, pour les équipes sur le terrain, d’un recul injustifié.

La fatigue solidaire dans un contexte d’inflation

L’un des facteurs les plus fréquemment cités par les clients opposés à l’arrondi est l’augmentation générale des prix, surtout dans l’alimentaire. Dans une note du cabinet NielsenIQ, 82% des Français interrogés affirmaient en 2024 avoir réduit leurs dépenses habituelles. Le don de quelques centimes peut alors devenir symboliquement lourd.

  • Baisse du pouvoir d’achat : les clients font des arbitrages drastiques.
  • Sensibilité accrue à la transparence des dons : certains doutent encore où va l’argent.
  • Sur-sollicitation : entre les appels aux dons, les enveloppes de rentrée scolaire et les campagnes ponctuelles, la générosité fatigue.

« On dirait que les gens veulent bien donner… mais uniquement quand c’est visible ou valorisé. L’arrondi, ça reste très discret. Du coup, certains n’en voient plus le sens. »

Un enjeu de formation et de discours

Face à cette ambivalence du public, certaines enseignes revoient leur copie. Des sessions de formation au don et à la communication positive sont désormais proposées à certains caissiers. L’idée : leur donner les bons arguments pour présenter l’arrondi, sans pression, mais avec conviction.

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Julie, elle, compte bien s’adapter. « Je ne vais pas forcer. Mais je vais rappeler que c’est quelques centimes, que ça aide vraiment une cause concrète. Les gens ont besoin de comprendre à quoi ça sert. » Son regard s’anime quelques secondes. Puis elle retourne à sa caisse, où les centimes forgent, parfois, un monde un peu meilleur.

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