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Elle se glisse discrètement dans les rendus de monnaie et finit souvent au fond d’un porte-monnaie sans qu’on y prête attention. Pourtant, cette pièce de 2 euros spécifique pourrait changer une vie — ou du moins, c’est ce qu’affirment certaines annonces en ligne. L’inscription « cette pièce de 2 euros va bouleverser votre vie » attire la curiosité, surtout quand des collectionneurs sembleraient y mettre jusqu’à 80 000 euros. Mais la réalité derrière l’engouement mérite un sérieux décryptage.
Une pièce grecque singulière
Tout commence avec une pièce grecque de 2 euros, frappée en 2002. Sur l’une des douze étoiles figurant sur la face européenne, un minuscule « S » est visible. Ce détail intrigue, voire électrise certains internautes. Imaginez : une pièce en euro qui, selon plusieurs vendeurs sur des plateformes de vente entre particuliers, atteindrait des prix délirants allant jusqu’à 80 000 euros.
Lors d’un échange avec Julien Lafèvre, numismate amateur mais passionné depuis plus de quinze ans, il m’a confié :
« C’est en lisant des articles en ligne que j’ai décidé de vérifier ma petite collection, et effectivement, j’avais une pièce avec ce fameux ‘S’. J’ai vu qu’elle était en vente à 32 000 euros sur un site… alors j’y ai cru. »
Le sens du « S » : la fin d’un mystère
Le petit « S » n’est pas le fruit d’une erreur rare ou d’un accident de fabrication. Il identifie tout simplement l’atelier qui a frappé la pièce. En l’occurrence, il s’agit de l’institut monétaire finlandais. « Suomi » signifiant « Finlande » en finnois, ce « S » apparaît sur des millions de pièces. En 2002, pour répondre à la forte demande liée au lancement de l’euro, la Grèce avait fait appel à d’autres pays — dont la France et l’Espagne — pour sous-traiter la frappe de sa monnaie.
Les différentes lettres et leur origine
Lettre | Pays de frappe | Pièces concernées |
---|---|---|
S | Finlande | 2€ |
F | France | 1c, 2c, 5c, 10c, 50c |
E | Espagne | 20c |
Des chiffres qui remettent les choses à leur place
Les chiffres officiels contredisent largement les espoirs d’un pactole caché :
- Quantité émise : 70 millions d’exemplaires avec un « S »
- Valeur réelle selon les catalogues : entre 8 et 14 euros (état neuf)
- Prix souvent observés sur eBay : 20 euros en moyenne
- Prix fantaisistes observés : jusqu’à 80 000 euros voire plus
J’ai passé plusieurs heures à éplucher les listings sur les principales plateformes de vente : des annonces à 4 500, 54 000 et même 100 000 euros abondent. Certaines spécifient même « sans retour possible », méthode typique pour décourager toute contestation future.
Un marché manipulé ?
Le phénomène n’est pas nouveau. Depuis 2019, des milliers de publications identiques prédisent fortune à toute personne possédant cette pièce grecque. Elles sont souvent partagées en masse sur les réseaux sociaux, semant la confusion.
Peter Feuser, un expert européen en numismatique basé en Allemagne, ne mâche pas ses mots :
« Dix millions d’idiots sur Internet pensent qu’ils vont devenir riches avec une pièce que n’importe qui peut encore avoir dans sa poche. C’est grotesque. »
Les vraies pièces qui valent de l’or
Le parallèle est saisissant si on regarde les véritables pièces rares cotées sur le marché. Par exemple, la pièce de 2 euros à l’effigie de Grace Kelly, émise par Monaco en 2007, est tirée à uniquement 20 001 exemplaires. Elle atteint des prix oscillants entre 2 000 et 4 750 euros dans les ventes spécialisées.
Voici quelques pièces réellement recherchées :
- Monaco 2007, Grace Kelly — Environ 2 500 à 4 750 €
- Saint-Marin 2004 — Environ 180 €
- Vatican 2005 — Autour de 300 €
Un avertissement qui mérite d’être entendu
Pour éviter les désillusions, mieux vaut vérifier plusieurs sources — et surtout, éviter de céder à la tentation d’acheter sans certitude. Le marché des pièces de monnaie ne déroge pas à une règle vieille comme le monde : ce qui semble trop beau pour être vrai… l’est souvent.
Certificat D’Authenticité« on les rachète à 800 fois leur valeur » : cette pièce de 2 euros qu’ont reçu tous les écoliers est très recherchéeJulien, celui qui imaginait vendre sa pièce à prix d’or, en a tiré une leçon forte :
« J’étais persuadé que c’était ma chance. Mais après avoir creusé un peu, j’ai compris que je faisais juste partie d’un gros buzz. »
Finalement, sa pièce vaut toujours 2 euros — ou 14, au mieux — et c’est bien ainsi.